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juin 2011

2011, Articles, Raiati

Le Dimanche de la Toussaint / le 19.06.2011 / N*25

Placer la fête de «Tous les saints» en ce dimanche qui suit la Pentecôte relève de l’éducation spirituelle, l’Esprit Saint étant le Tuteur de la Sainteté – autant celle de l’Eglise que du croyant. L’expression «tous les saints» désigne les personnes canonisées et célébrées par un jour de fête durant l’année liturgique. Elle réfère également à ceux dont la sainteté ne fut pas reconnue officiellement par un acte de canonisation du Saint Synode.

L’épître aux Hébreux évoque les saints de l’Ancien Testament: d’abord Moïse, ensuite les prophètes auteurs de livres tels Esaïe, Ezéchiel, Jérémie, Daniel, enfin ceux qui n’ont pas laissé d’écrits, St Elie par exemple. L’auteur de l’épître décrit l’agonie et les souffrances endurées par ces saints, ajoutant quand même que ceux-ci n’arrivèrent pas à l’accomplissement sans nous, les chrétiens. C’est qu’ils devaient attendre la perfection accomplie par le Christ sur la Croix. Les personnages de l’Ancien Testament parvinrent à la sainteté, puis se mirent à l’attente du Christ. A l’époque du Nouveau Testament, ce sont ceux qui procédèrent de l’Evangile qui furent sanctifiés.

A travers le péricope évangélique, l’Apôtre présente une définition partielle de la sainteté en disant: «Quiconque se déclarera pour moi devant les hommes, je me déclarerai moi aussi pour lui devant mon Père qui est aux cieux». Dans le christianisme, il s’agit de faire une confession orale publique où l’on déclare appartenir au Seigneur. Nul ésotérisme chez nous, dans le sens où nous ne gardons pas secrète notre foi en Christ. Nous ne disons rien qui s’oppose à notre foi ou qui la contredise. Cette confession pourrait bien nous entraîner devant les bourreaux, ou même devant la mort. Sur ce, nous appelons «confesseurs» tous ceux qui subissent la torture de la part des ennemis, et «martyrs» ceux qui sont exécutés.

Le deuxième élément de la confession de foi est de porter la croix de Jésus – à savoir, tous les tourments de la vie présente – et de le suivre. Ce pourrait être des tourments quotidiens: au domicile, au travail, ou dans le cadre d’une activité sociale ou politique. Le troisième élément de sainteté est de renoncer aux maisons, aux frères et aux sœurs pour le nom de Jésus. Il est entendu par là qu’il ne faut nullement s’attacher aux choses de la terre. Cela ne signifie quand même pas abandonner son logement pour vivre dans la rue, mais plutôt de ne fixer son cœur ni sur des maisons, ni sur des voitures, ni sur le pouvoir et la domination. Tu es nécessiteux du Christ, et Lui fais en toi sa demeure. C’est à Lui que tu réserveras ta loyauté la plus sincère, non à tel dirigeant, tel parti, ou tel objet matériel. Il faut que ton cœur soit complètement absorbé dans le Christ, qu’Il devienne ta jouissance. Tu disposeras de toute autre chose selon le besoin. Quant aux membres de ta famille, tu leur offriras un service sincère. Ce service familial n’est autre que ta charité, dans laquelle tu engages le Christ. Cependant, il se pourrait que certaines personnes de ton entourage s’avèrent un empêchement à ton contact avec Jésus. Ton gagne-pain pourrait autant gêner ta familiarité avec Jésus. Telles gens se rejoignent par les intérêts des adversaires du Christ; tu les quitteras. Tout en priant pour eux, tu te garderas bien de leur société. Le plus important est que le Christ occupe ton esprit par l’ensemble de son enseignement, jusqu’à t’en nourrir. Il te faut savoir où tu te trouves, et qui sont tes familiers. Il faut savoir où est centré ton cœur. Est-ce en Christ? Tu le sauras en suivant ses commandements, selon sa parole: «Celui qui m’aime gardera mes commandements». Le Christ est tout. Porte les gens à s’attacher à lui, et tout ira bien pour toi. Ne pas t’y adonner serait te dissiper en vain. L’important est que ta vie prenne source dans le Seigneur

Traduit par Monastère de Kaftoun

Texte original: « أحد جميع القديسين » – 19.06.2011-Raiati no25

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2011, An-Nahar, Articles

Le moi / le 11.06.2011

Je me vis contraint d’ajouter à ce mot l’article défini. Cela me permit d’abattre la concentration sur le moi et l’autosuffisance. En effet, l’attachement extrême à soi est la mort en soi, puisque la mort est l’isolement extrême.

Discernant ce péril de l’amour de soi, le grand Pascal dit: «Le moi est haïssable». C’est la passion du pouvoir au paroxysme, mais plus grave encore, du moment qu’une recherche modérée du pouvoir cèderait quand-même quelque place à l’existence d’autrui. Quant au péché qui constitue aujourd’hui l’objet de notre étude, il va jusqu’au bannissement total des autres. Le minimum de communication est aboli, mais en toute lucidité d’esprit, avec la connivence d’un cœur pourri qui s’y soumet. L’autre est complètement exclu, on le met à mort, sans l’exécuter physiquement.

Pourquoi donc un tel acharnement de ma part contre le moi? C’est que, selon notre définition philosophique, voire théologique de l’homme, ce dernier est par nature un être de communication. Il n’est pas exclusivement centré sur sa personne; il n’est pas son unique pôle d’aimant. L’existence des hommes n’est pas une accumulation d’individus séparés, vivant chacun dans le repliement de son autonomie. Dans l’existentialisme religieux, ils sont désignés comme des «personnes». La personne, bien qu’autonome, est par définition un caractère ouvert. Ainsi, elle tolère l’autre pour s’affranchir de son enfermement sur elle-même, pour diriger son existence vers la formation de sa personnalité dans la communion de l’autre. Dans l’amour, chacun s’épanche en l’autre, sans y fondre. Il ne s’agit ni d’une accumulation, ni d’un attachement, mais d’une union où chacun garde son existence intérieure.

Ces deux existences forment chacune un langage propre. Personne ne rumine l’autre, car autant on le ressasse, autant sa personnalité fond, perdant de sa vitalité, de sa particularité, de sa splendeur. Au contraire, celles-ci devraient redoubler de vigueur, afin que l’autre prenne assez de forces pour soutenir sa propre existence et la mienne, dans le mystère d’une union où la dualité puise dans l’unité. Chacun se déverse dans l’autre de tout son être, totalement. Alors, par la perfection même de cet épanchement, on se voit s’affermir dans son «moi» – un «moi» beau et noble, qui ne se laisse pas entraîner à l’arrogance, ni à la vanité, ni à l’élimination de l’autre. Certes, l’humilité exige l’effacement, mais c’est par ce même effacement que l’homme se retrouve et trouve l’autre au-dedans de lui-même. Ainsi, chacun se perfectionne en se donnant. Comment exister en s’effaçant: là réside tout le mystère de la rencontre d’amour avec l’autre, qui seul permet à la personnalité de s’affirmer.

Sans cette rencontre propice à l’échange vécue sur un plan ontologique et dans le cadre du travail, chacun demeure prisonnier de son ego, à l’instar des damnés de l’enfer décrits dans la tradition des Pères de l’Eglise. Selon ces derniers, les condamnés au feu se tournent le dos; personne ne voit le visage de l’autre.

Voilà donc une manière d’exprimer la Trinité du Christianisme, suivant les paroles du Christ: «Je suis dans le Père, et le Père est en moi». Le Père garde son identité par la Paternité même qui communique au Fils son identité filiale. En recevant du Père, le Fils reste son Bien-aimé; leur union est amour. En Dieu Seul l’Unité ne contredit pas la dyade ou la triade. Dieu n’est pas Un en nombre. «Le compter, c’est le limiter», dit l’Imam Ali. Dieu est Unique. «Dieu est Amour» (1Jean 4: 8), l’amour n’étant pas son attribut. Il est son nom, son Etre même. Dire que Dieu est trois hypostases ne veut donc pas désigner une valeur numérique; il ne s’agit pas d’arithmétique. Dieu ne saurait être compté.

Quant à l’homme, s’il est possible de lui attribuer la valeur numérique «un». Pourtant, ce «un» n’est pas enfermé su soi. Il est «un» à cause des sentiments réciproques de charité qui le lient aux autres. Faute de savoir cela, l’individu serait passionné de son ego. Obstruant toutes les portes de son cœur, et se fixant une image pétrifiée, il voudrait s’ériger comme sa propre idole, et celle des autres. L’amour de son ego le porte à s’idolâtrer, et à rechercher son culte chez les autres, comme pour les inviter  eux-mêmes à s’attribuer un culte. En résultat, ils se trouvent tous aux prises de la servitude.

Rassembler un certain nombre de gens au sein d’une famille, d’une cité, d’un pays, d’une école, d’une université, ou d’une usine ne suffit pas pour en faire des hommes aux cœurs solidaires. Une telle société est unifiée seulement en usant la force et l’oppression. C’est une société à caractère politique, basée sur la force, et une collaboration coercitive. Par contre, la réalité humaine ne se trouve pas dans le rassemblement des masses, mais dans la rencontre des cœurs. Il va sans dire que les lois et les règlements sont indispensables pour le bon ordre des sociétés, pour la bonne organisation des diverses fonctions; mais ce sont des liens purement sociaux auxquels on défaillit rarement.

La société à fondement politique offre à l’homme une certaine sécurité grâce au minimum de garde publique assuré par l’Etat à travers ses différents organes. Une telle société est plutôt vouée à la productivité intellectuelle et économique. Dans les cercles de l’élite cultivée les esprits s’effleurent, et s’apparentent de plus en plus à l’archétype d’une confrontation ontologique où le «moi» s’ouvre sur l’autre «moi». Il faut dire qu’en principe, tout «moi» recherche la vérité. Aussi bien, la personne vraiment ingénieuse recherche-t-elle le Beau et le Bien, et ne jalouse pas les autres ingénieux. Il advient cependant que le péché s’introduise dans la société des élites intellectuelles et artistiques, et en refroidisse les élans intérieurs.

Seul le renoncement peut vaincre l’ego refermé sur lui-même. Il est vrai que la passion de l’argent est le pire désastre, car l’argent, une fois chéri, endurcit l’homme et lui donne un cœur de pierre. Il perd toute sensibilité et se mure dans son ego. Or le «moi» ne s’ouvre qu’en donnant, et passe dans le monde du «nous». Que l’on s’adonne à un acte volontaire d’appauvrissement, et voici l’autre se présenter à nos yeux comme un bien-aimé. De plus, obliger l’autre d’un accueil généreux nécessite que l’on dispose d’une part de ses petits biens. D’où l’importance de la générosité, à cause du sentiment de privation qu’elle laisse, comme si l’autre nous complétait.

En outre, cet argent qu’on possède et pour lequel on s’engoue se dresse aux yeux de l’homme pour l’empêcher de voir les pauvres, ceux-là même que Jésus appelle ses petits frères. Que l’on rejette donc tout ce qui entrave leur vision, tout en sachant que l’argent sert à imposer son pouvoir. L’homme puissant s’imagine être seul dans l’existence, la multitude existant seulement par lui. C’est le type de l’ego refermé sur soi par excellence. Telle est la figure du despote absolu, qui a pour seul souci de se maintenir au pouvoir. Que les gens vivent ou meurent, peu importe. Le despotisme réside dans le fait même que le puissant se convainc d’y trouver la recette de son pouvoir, alors qu’en vérité il ne fait que s’idolâtrer. Le pays aurait beau réussi dans tel ou tel domaine, sur le plan intellectuel, il essuie un échec. D’ailleurs, que règne la peur du régime, et l’appréhension mutuelle dominera les citoyens,  car chacun suspectant l’autre de supporter le régime totalitariste.

Théoriquement, l’Etat serait en mesure d’aider l’homme à devenir une source de vie spirituelle. Il pourrait s’humaniser, dans le sens où la personne ressent que l’Etat n’est pas une institution de l’oppression, et qu’il soutient les démunis. La politique devrait faire fi à l’oppression, et maintenir la justice.

Il faudra diriger les efforts vers la métamorphose de la société urbaine en une société de cœurs reliés par une compassion et une tolérance idylliques, dans un esprit de loyauté et de confiance.

Traduit par Monastère de Kaftoun

Texte Original: « الأنا » – 11.06.2011

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2011, An-Nahar, Articles

Le leader / le 04.06.2011

On est leader de naissance, même avant d’atteindre les dix ans, ou on ne l’est pas. On se connaît porteur d’une cause à défendre, voire capable d’effectuer un changement. En effet, le changement prend source dans une certaine vision de l’état souhaitable des choses, lorsqu’on est insatisfait du présent. On est hanté par l’idée de créer quelque  chose de nouveau, un monde nouveau. Pour matière première, on dispose d’hommes et de femmes, dont des personnes éclairées, mais qui n’on pas assumé la cause. Chez d’autres, elle sombre dans les tréfonds de l’âme, attendant qu’on vienne l’éveiller.
On se sent donc chargé par le bon sens et par le Bon Dieu de stimuler cet éveil. On reconnaît sa responsabilité, d’abord parce que ce mouvement de l’âme est un message qu’il faut donner, ensuite parce qu’on ne peut plus souffrir le monde tel qu’il se présente. On œuvre alors pour un monde nouveau, qu’on croit fermement  réaliser soi-même, non sans ceux qui viennent s’enrôler. Ainsi, on formera des adhérents à la cause, qui ne seront pas nécessairement subordonnés, mais qui auront les mêmes convictions. Ceux-là seront l’embryon de ce monde nouveau, reçu ‘du ciel’ on ne sait comment. Dès lors, on demeure impatient de percevoir les prémices du renouvellement chez les compagnons, lorsque la vie pourra jaillir abondamment d’une source commune de fidélité et de savoir.
Or la clarté du  nouveau message pose certaines conditions. Avant tout, il faudra renoncer à soi-même, et ne jamais céder aux attraits de la position du chef, car telle position est une convoitise. Or, l’homme dominé par ses convoitises se trouve dirigé par elle, au lieu de les diriger lui-même à la vérité. D’où les riches ne sauraient devenir des leaders, car ils se confient eux-mêmes une cause. Cependant, n’ayant d’autre intérêt que pour eux-mêmes, il leur est impossible de recevoir un message supérieur.
C’est en renonçant à ce monde qu’on en tient le gouvernail. Par contre, celui qui le convoite est soumis, et ce désir le fait mourir en languissant pour la cause. Par le détachement, on ressent le poids de la charge assignée. On accepte le fardeau quand même, convaincu de la priorité du message, et déterminé à en mourir, n’importe la forme de cette mort. Alors, cette mort est conçue comme un chemin à la vie, qui resplendit sur la face de chaque membre de la communauté à laquelle le don incombe. Ainsi, par la charité, par les sacrifices, par une attitude désintéressée, par le service constant dans le but d’éclairer soi-même et les autres, et d’anéantir le «moi» par le «nous», cette communauté se voit raffermie. Or ce «nous» n’est point un entassement d’individus. C’est plutôt une condensation de la conviction commune que le monde est voué au renouvellement, ce dernier s’effectuant  par un effort quotidien pour se purifier et se donner. Sinon on risque de contracter quelque familiarité avec la paresse.
Il n’importe guère d’organiser ce mouvement qui excite les âmes en tenant des conférences et des tables rondes, ou en publiant des livres… L’important est la flamme, je veux dire ce feu qui consume à l’intérieur et devient une lumière pour soi-même et pour ceux que l’on inspire. Ce feu n’est autre que la foi par laquelle le futur se présente sous un jour réel, puisque le croyant rejette le présent tout fait, tout donné, et avance plutôt vers l’invisible qu’il espère se réaliser, dans l’attente de voir le monde changer.
L’univers est livré à nous, ainsi que les hommes. Chacun de nous est le pasteur de son frère, jusqu’à ce que ce membre du troupeau devienne un pasteur à son tour. Alors chaque cœur émanera des éclats de lumière.
Dans le monde, le mal n’a jamais cessé d’exister; on le sait bien pour avoir reçu l’illumination. Et pourtant, on espère toujours changer ce monde que l’on a déjà assumé, également porté par l’enthousiasme et tenu par l’obligation de la tâche confiée. On éveille donc les hommes à leur propre tâche, et les voilà qui perçoivent leur vocation de servir la vérité. Ils conçoivent que leur salut réside dans un éveil collectif au devoir de charité et de service envers autrui.
Ce monde ici-bas est tout péché. «Le monde entier est sous l’empire du mal». On rejette, cependant, cet état de chute, mu par la foi que la parole personnellement reçue de Dieu est capable de purifier le monde, car elle est «lumière et vie». Assez souvent, on voit le péché dominer ce monde, et son règne s’étendre aux quatre coins de la terre, et parmi un grand nombre de gens. Voici donc ce que l’on entend Satan chuchoter à son oreille: «Que sert-il de relever ceux qui ont chuté? Ils rechuteront encore, et de même ceux qui les suivront! Ce sera toujours ainsi jusqu’à ce que sonne l’heure».
Le plus important est de ne pas s’en remettre au statu quo, de ne pas désespérer de changer les hommes et les cœurs. Lorsque David dit «Lève-toi Ô Dieu, règne par la terre», il savait bien que les méchants sont nombreux, et que c’était le règne du péché. Nonobstant, il avait compris que le Seigneur à le pouvoir de changer l’univers entier. Il savait que Dieu pénètre les cœurs, pourvu qu’ils le désirent, voire qu’ils deviennent sensibles à ses paroles.
Les personnes qui ont une vocation spirituelle sont précisément celles qui croient que le monde n’est pas livré à la fatalité des transgressions, qu’il est toujours possible de mener une vie pure, et que Dieu ne se plaît pas à opprimer les hommes. Dieu n’a pas dit que l’ensemble des hommes feront de la terre un paradis avant la gloire collective qui nous attend au Jour de la Résurrection. Jamais ne fut-il enseigné, ni dans notre religion ni ailleurs, que la foi atteindra une échelle universelle. «Trouverai-je la foi sur la terre?» Néanmoins, nous sommes appelés à mener le combat, comme des personnes animées par l’espoir que tout homme et tout le monde connaissent un jour la métamorphose. Déclarer que nous menons notre combat à la lumière d’une telle espérance, signifie que nous recevons cette espérance de Dieu, non que les hommes désirent tous le repentir. Or, désirant le bien qu’il a semé par sa parole, le Seigneur inspire de sa grâce des âmes vaillantes dans la lutte spirituelle et persévérantes à donner. Ces dernières invitent les adeptes de la charité et du don à la collaboration spirituelle, pour léguer cet esprit du don chaque jour à l’humanité, créant ainsi des paradis-oasis au sein de la sécheresse universelle.
On dirait que les êtres humains tendent toujours vers le bien, malgré leurs péchés. C’est un peu comme le meurtrier nostalgique de la phase d’avant le crime. C’est comme si les saints venaient raviver l’espoir de l’humanité. Certes, la sainteté est le rêve commun des mortels, mais le péché est attrayant. Parsuite, la justice demeure une utopie que peu de gens osent tenter. Il semble que la majorité penche vers la faiblesse et la lâcheté. Dans les milieux chrétiens, lorsque l’Eglise canonise un juste pour sa vertu exemplaire, nombre de personne se réjouissent, mais la plupart disent: «C’était un être prodige, une créature exceptionnelle. Mais tant de grandeur n’est pas pour moi; il m’est difficile de renoncer à mes plaisirs». Il paraît que la population chrétienne présente deux voies parallèles qui ne se rencontre que dans le pays des rêves: la sainteté sublime, et la négligence ultime du moindre effort pour mener la vie dite «normale». Ainsi, qu’un prédicateur appelle à un summum de sainteté, et voici un chrétien assez vertueux intervenir: «voulez-vous donc que je devienne un autre Christ?» Mais le Christ serait-il venu entonner l’hymne de la justice pour soi-même? N’était-ce pas pour l’apprendre aux hommes?
Selon une telle conception, le christianisme n’aurait existé que pour prendre fin en Jésus Christ. Que voudrait donc dire la parole: «Et moi je suis avec vous tous les jours, et jusqu’à la fin des temps?» (Mt 28: 20), sinon que «Je voudrais que chacun de vous devienne comme moi». «Celui qui croira en moi fera lui aussi les œuvres que je fais : il en fera même de plus grandes parce que je vais au Père» (Jn 14: 12). La religion chrétienne est un ensemble de christs ou n’est rien du tout. Elle est Jésus en personne, lui qui veut que tout croyant devienne à son image. Elle est avant tout le fait de croire que c’est possible, parce que le Christ est véridique, parce qu’il exerce son action puissante via son Esprit Saint. Or cette action exige de nous un service volontaire.
J’estime que si un grand nombre de chrétien se montrent défaillants et indignes du Christ, c’est qu’ils ont peu de foi en ce pouvoir que le Sauveur tient sur leurs âmes. Ils se montrent lâches quand il faut témoigner, quand il faut préserver une âme évangélique. «Lève-toi Ô Dieu, et règne sur chacune de nos âmes, et que le monde contemple ton éblouissante lumière».

Traduit par Monastère de Kaftoun

Texte Original: « القائد » – 04.06.2011

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